> Les Amis du Musée
Les origines du Musée de Dieppe ont été exposées à diverses reprises, par Ambroise Milet, par André Boudier (Bulletin des AVD, année 1955, fasc. LIX) Pierre Bazin (année 1976, fasc. LXXXIII).
Notre association regroupant les Amis du Musée a sa propre histoire, qui se confond bien souvent avec celle du musée, à tel point que fréquemment le contenu de notre bulletin constitue le catalogue d’une exposition, ou le recueil d’allocutions fort érudites prononcées à l’occasion d’inaugurations.
Camille Saint-Saëns a donné son adhésion à l’association des Amys duVieux Dieppe dès la création de celle-ci en 1912. Bien que n’étant pas né à Dieppe, il considérait notre ville comme sa ville natale. Il fut un véritable Ami du Musée, auquel il fit des donations importantes, et il honora celui-ci de sa présence, en particulier le 18 juillet 1897, jour de l’inauguration des nouvelles salles de ce musée qui était alors installé dans un bâtiment situé prés de l’Hôtel de Ville, rue de l’Hôtel de Ville (actuelle rue du Commandant Fayolle).
Les Amys du Vieux Dieppe se devaient de consacrer à Camille Saint-Saëns un bulletin spécial, ce qui fut fait en 1935 (fasc. XXXV). Et ils expriment le vœu que Dieppe puisse un jour créer un festival consacré à l’œuvre de Camille Saint-Saëns, et pourquoi pas, dans le théâtre qui se trouve justement place Camille Saint-Saëns (!), lorsque la réhabilitation de celui-ci sera achevée.
Jusqu’en 1947, la couverture du bulletin, sous le nom de l’association qui y déploie ses festons gothiques, proclame son intérêt pour l’ART, l’HISTOIRE, et l’ARCHÉOLOGIE fidèle à un usage établi depuis les origines, 35 ans auparavant. Et voilà qu’en 1948, la couverture du 49e bulletin annonce que les Amys du Vieux Dieppe deviennent également Amis du Musée et de la Bibliothèque, abandonnant toute référence à l’art, l’histoire et l’archéologie. Est-ce une révolution ? Non ! C’est simplement la consécration formelle d’une situation qui existe en fait depuis les origines. En effet, c’est lors de l’assemblée générale du 12 février 1948 que Georges Guibon annonce qu’il conviendrait de donner satisfaction à des Inspecteurs du Ministre de tutelle qui demandent la création d’associations ayant pour objet d’assurer la prospérité des bibliothèques et des musées. “De telles associations paraissent éminemment souhaitables, mais en ce qui concerne Dieppe, l’importance de sa population n’est pas si grande qu’elle permette à ces groupements d’avoir un nombre suffisant d’adhérents.”
D’ailleurs nos statuts donnent déjà vocation à notre association de travailler à l’amélioration du musée et de la bibliothèque municipale. C’est donc en 1948 que notre association confirme une triple personnalité qu’elle affichait déjà à sa naissance.
En effet, des 1912, Camille COCHE, notre Président fondateur aborde la question du château. Il fait ressortir l’utilité de procéder au plus tôt aux grosses réparations nécessaires à sa conservation, et propose de saisir le conseil municipal d’un projet qui le transformerait en Musée. Le musée actuel, devenu insuffisant, ne peut abriter les collections qu’on lui destine.
Mais je laisserai la parole à Camille Coche lui-même, tel qu’il s’est exprimé devant la Commission des Antiquités de Seine Inférieure dont il était membre, le 26 avril 1912.
"J’ai eu le souci, étant maire de Dieppe, d’assurer à la Ville la conservation de son vieux château. Or c’est précisément de ce château que je voudrais vous entretenir. Il me faut dire avant tout que si je me suis intéressé à sa conservation, comme je l’ai fait, et si je me suis attaché, d’une façon générale, à protéger dans la ville son patrimoine historique, archéologique et artistique, c’est que j’en ai apprécié la valeur, grâce à votre docte ami, votre collègue M. Milet, dont l’érudition et l’expérience n’ont d’égale que sa modestie. La question dont j’ai à vous entretenir présente un certain caractère d’urgence. Dans l’une des dernières séances du Conseil Municipal de Dieppe, l’un de nos collègues. a proposé la démolition de la caserne Ruffin, dépendance du château. Évidemment cette caserne, qui date du XVIIIe, ne présente pas par elle-même un caractère architectural bien considérable. Mais elle s’appuie sur l’ancien rempart et sa disparition amènerait la reconstruction du couronnement de ce rempart, ce qui peut présenter des difficultés. De plus, si l’on considère que chaque siècle a apporté au Château de Dieppe son contingent de constructions, n’est-il pas à propos de le maintenir tel qu’il se présente aujourd’hui dans son ensemble. La ville de Dieppe n’a pas d’ailleurs les fonds suffisants pour songer, comme on l’a fait à Pierrefonds, à une reconstruction intégrale d’un édifice d’architecture militaire du XVe siècle. Vous savez, mes chers confrères, que mon ambition, comme Maire, était d’installer au Château notre riche musée, comme étant le plus sûr moyen d’assurer sa conservation. Or, dans cette installation, les bâtiments de la caserne joueraient un rôle bien utile. C’est pourquoi, si la commission partage mon avis, je lui propose d’émettre un voeu en faveur de la préservation de cette caserne Ruffin. "
Ce vœu fut approuvé à l’unanimité par la Commission qui décida de sa transmission au Préfet et au Maire de Dieppe. On sait ce qu’il advint de cette caserne qui fut cependant démolie.
Le 23 Juin 1912, le bureau de l’association visite le château, et le 1er août c’est le tour des membres de l’association. L’affaire est rondement menée, mais survient la guerre de 1914-1918, et le château retourne à sa vocation militaire, étant occupé par l’armée britannique jusqu’en 1920. À cette date, Camille COCHE repart à l’assaut : "… Serait-il pardonnable de laisser plus longtemps sans utilisation en le vouant à une ruine prochaine, ce Vieux Château qui symbolise la brillante histoire de notre cité ! N’est ce pas le cadre tout indiqué pour y placer les collections du Musée et de la Bibliothèque”.
C’est, en définitive, le 9 juillet 1923 que le musée transféré au Vieux Château est officiellement inauguré, là où il se trouve toujours, à la grande satisfaction de ceux qui, depuis des années, militaient en ce sens.
Mais, depuis lors, les Amys du Vieux Dieppe, sous des formes multiples, n’ont jamais cessé d’apporter leur aide au musée. Cette action a d’ailleurs été consacrée par une convention passée entre la Ville de Dieppe et les Amys du Vieux Dieppe le 25 avril 1995, et reproduite intégralement dans le bulletin année 1995 (fasc. CII) aux termes de laquelle l’association ”associe ses efforts à l’action de la Ville pour ce qui concerne la vie du musée, sa promotion, l’enrichissement de ses collections et leur valorisation, le montage d’exposition,”le tout, dans le strict respect des attributions du conservateur du musée".
Cela comprend tout autant les tâches administratives dévolues à notre trésorier que l’édition des imprimés et publications diverses destinés à assurer la promotion du musée et des expositions permanentes ou temporaires. Le plus spectaculaire étant représenté par les quelques 315 objets acquis par l’association, et cela seulement depuis 1949, à l’aide du budget dont elle dispose grâce à la Ville de Dieppe, ou à ses fonds propres.
L’art, grâce au musée, affirme toujours sa présence dans la vie des Amys du Vieux Dieppe. L’expression artistique est de tous les temps et grâce aux expositions temporaires qui sont offertes au public du Château-Musée, l’art contemporain n’est pas oublié. C’est d’ailleurs l’originalité de notre association, que l’on croirait volontiers endormie dans son passé, d’être amenée à s’intéresser et à soutenir les formes variées par lesquelles s’exprime l’art moderne, ce qui amène à des confrontations parfois difficiles, parfois réjouissantes, mais toujours enrichissantes.
De même que l’histoire se fait sous nos yeux, de même l’art contemporain, qui se veut si novateur, deviendra à son tour un objet du passé, soumis à l’examen des futurs historiens de l’art. C’est au moins, en dehors de la curiosité, une raison pour prêter attention à ce phénomène de la création dont nous sommes les témoins.
A propos du musée